Varia n°1 / Communications organisationnelles : Comprendre et discuter les propositions théoriques de Christian Le Moënne. Un corpus de textes de 1994 à 2016

Chapitre 4 - La communication et ses acteurs : les enjeux et finalités au-delà de la fonction et des métiers

Valérie Lépine

Résumé

Valérie Lépine (chapitre 4 : La communication et ses acteurs : les enjeux et finalités au-delà de la fonction et des métiers) s’intéresse à l’approche que fait CLM de la fonction « communication » dans les organisations. Elle pointe la manière dont notre auteur articule une vision critique du rôle que prend la communication dans le développement de valeurs sociétales qui ne sont pas étrangères aux besoins managériaux, et une proximité avec le travail communicationnel des équipes au travail qu’il soutient. Elle montre comment la perspective d’analyse de l’institutionnalisation de la fonction « communication » renvoie chez CLM à une analyse de la « sphère professionnelle capitaliste » et aux tentatives de normalisation managériale. Cette visée normalisatrice touche aussi bien l’espace de la mise au travail et de son organisation que l’espace de l’administration et de son organisation structurelle, et, enfin, l’espace global des relations entre les entreprises et leurs différents environnements. La communication managériale, avec son étendard éthique, plus large que la communication institutionnelle, a les mêmes finalités. Estimant que CLM a plus envisagé la fonction et les pratiques de la communication professionnelle sous l’angle politique que sous l’angle sociologique, Valérie Lépine souligne les angles d’analyse qui ont été multipliés ces dix dernières années par les chercheurs en communication organisationnelle. 

 

Valérie Lépine est Professeure des universités en SIC à l’Université Paul Valéry et membre du LERASS-Ceric. Elle est co-animatrice scientifique du Groupe d’études et de recherche Org&Co de la SFSIC et co-fondatrice du Resiproc (Réseau international sur la professionnalisation des communicateurs). Ses travaux portent sur l’évolution des normes, pratiques et compétences professionnelles dans le champ de la communication organisationnelle.

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La communication et ses acteurs : les enjeux et finalités au-delà de la fonction et des métiers

Valérie Lépine

Professeure - Université Paul Valéry - Montpellier 3

LERASS Ceric EA 827

Nous souhaitons ouvrir ce chapitre sur une citation extraite d’un des textes les plus récents publié par Christian Le Moënne (2016) dans la revue française des sciences de l’information et de la communication, à l’occasion du bilan tiré de « 30 ans de recherches sur les communications organisationnelles ». La conclusion de cet article pointe des manques ou regrets qui sont aussi des appels à relancer et reprendre de manière approfondie deux aspects qui auraient été négligés dans les recherches en SIC. Sa première remarque concerne la nécessité de dresser un vaste travail d’actualisation des données produites dans les années 1990 sur l’émergence et le développement des secteurs professionnels de la communication :

« (…) il me semble que nous avons pour une assez large part renoncé à faire des états des lieux des pratiques sociales et professionnelles de communications, et à faire un état des structures, budgets, professionnalismes, logiques d’actions et de représentation de ce secteur professionnel vaste et influent des communications organisationnelles. Je crois que toutes les connaissances sur ces pratiques sociales et professionnelles existent mais de façon dispersée, sans qu’en soit fait une synthèse et sans que les évolutions globales et les données quantitatives et qualitatives qui permettent de les appréhender ne soient mises à disposition de l’ensemble de notre communauté. » (Le Moënne, 2016 : §52)

Sa seconde remarque porte sur le recul des approches critiques pour aborder les pratiques sociales et professionnelles de la communication. Ces deux réflexions sont en fait étroitement liées et renvoient l’une et l’autre aux travaux princeps menés par Christian Le Moënne pour sa thèse[1] portant sur l’émergence du phénomène de la communication d’entreprise en France (1990) ; approfondis ensuite dans son mémoire d’HDR (1994).

Si cette question de recherche développée essentiellement dans la période 1991-1998 ne l’a jamais complètement quitté, elle apparait relativement en filigrane dans la plupart des textes postérieurs à cette période. Cependant, au moment de revenir de façon rétrospective sur son parcours de chercheur CLM revient sur l’importance du développement de la communication d’entreprise – souvent assimilée à la communication dite institutionnelle, qualifiée de « globale » par certaines agences-conseil – à la fois comme phénomène symptomatique d’une évolution du capitalisme et incidemment comme point de départ de sa vocation de chercheur.

Il est assez frappant de mettre en regard la posture théorique du chercheur, assumée et revendiquée comme critique, et sa pratique concrète de la recherche-intervention qui a été menée pendant de nombreuses années dans une position de conseil et d’accompagnement aux côtés des entreprises ou organisations du secteur social ou associatif. Christian Le Moënne a rappelé, dans un entretien donné à Sidonie Gallot pour la revue Communiquer (2015), qu’il a dirigé, pendant une dizaine d’années, une société de conseil en organisation et en communication, accédant ainsi à un ensemble de terrains d’observation et de données notamment mobilisés pour sa recherche doctorale.

Cette activité de conseil s’est poursuivie de façon ponctuelle et discrète tout au long de sa carrière et a constitué une ressource au long cours de collecte de données empiriques et de renouvellement de ses problématiques de recherches. Sans doute cette activité – peu mise en avant compte-tenu de la critique féroce que Christian Le Moënne adresse au monde de la consultance qui se satisfait volontiers de modèles réducteurs et participe de la propagation d’une vision déformée de la communication mise au service du capitalisme – a-t-elle apporté le substrat empirique qui fait assez souvent défaut dans ses écrits. Ou qui n’est en tous cas que très rarement explicité, tant en termes de collectes de données que de méthodes d’analyse.

L’essor des « communicateurs » aux postes de dircoms ou chargés des communications dites institutionnelles ou corporate mais aussi tous les acteurs qui, par leur position fonctionnelle ou hiérarchique, sont en mesure d’exercer une certaine maitrise de la mise en forme ou en sens de l’information, de contrôler sa diffusion et de jouer un rôle dans l’évolution des pratiques sociales et professionnelles constituent donc un objet de recherche dans le champ des communications organisationnelles, dont nous proposons de suivre le fil dans les travaux de CLM.

Dans ce chapitre, il n’est pas dans notre propos de revenir sur ses travaux de thèse – menée en sciences politiques – et d’Habilitation à Diriger des Recherches, mais plutôt de repérer ce qu’il en reste dans sa production ultérieure et en quoi ses hypothèses de départ ont contribué à poser les fondements d’un programme de recherche original.

Nous assumons ce parti d’examiner en quelque sorte l’héritage laissé postérieurement à ses travaux princeps par CLM sur les problématiques d’institutionnalisation de la fonction communication et sur le rôle des acteurs professionnels car nos propres travaux (Lépine, 2014, 2016, 2018) s’inscrivent eux-mêmes dans cet ensemble de questionnements au sein du champ des communications organisationnelles. En particulier nous nous intéressons au sein du RESIPROC[2](Réseau International sur la Professionnalisation des Communicateurs) aux nombreuses dynamiques dans lesquelles s’inscrivent les évolutions des pratiques professionnelles de la communication et aux caractéristiques de la professionnalisation d’acteurs et groupes qui assument directement ou indirectement des activités, missions et fonctions d’information-communication et participent ainsi à un travail d’organisation. Nous analysons notamment aux côtés d’autres chercheurs qui en ont fait un objet central dans leur recherche (De La Broise, 2012 ; Galibert, 2014 ; Morillon, 2016 ; Domenget, 2017 ; Lépine, 2018 ; Seurat, 2018)[3] : les rapports entre modèles théoriques, cadres de pensée et action-praxis ; les relations complexes et parfois ambiguës entre académiques et praticiens ; les trajectoires de formation et d’évolution professionnelle ; les processus de (trans)formation des identités professionnelles consécutives au repositionnement des acteurs, à l’émergence de groupes revendiquant de nouveaux métiers, des compétences spécialisées ; ou encore les activités corporatives visant à asseoir la légitimité institutionnelle et la reconnaissance de la communication. Ces problématiques que le RESIPROC cherche à éclairer en capitalisant sur des travaux empiriques et théoriques rejoignent les préoccupations de grandes associations internationales telles que l’EUPRERA[4].

Aussi, il nous semble que le regret formulé dans l’interview donnée par CLM en 2015 (Le Moënne et Gallot, 2015) quant à la faible visibilité et capitalisation des travaux et chercheurs s’intéressant à la professionnalisation de la communication a une réponse illustrée par ces réseaux d’études et de recherche internationaux. Il est d’ailleurs intéressant d’observer que l’étude des pratiques et activités professionnelles de la communication se mène aujourd’hui à une échelle qui dépasse les frontières nationales et dans des perspectives comparatives à la fois diachroniques et synchroniques. L’élargissement et l’amplification de ce champ de recherche reflètent « la généralisation et professionnalisation de la communication des organisations » recensée parmi les grandes thématiques traitées par les Sciences de l’information et de la communication (CPDirSIC 2018 : 72)[5] ; cet élargissement concerne aussi les champs de la communication publique et politique, avec des auteurs comme C. Ollivier-Yaniv, et D.Bessières.

CLM a été parmi les précurseurs, avec Jacques Walter qui a étudié l’émergence de la figure du ‘dircom’ (1995) et Jean-Luc Michel qui s’est intéressé à la fonction et à la différenciation des métiers de la communication (1998), à proposer une analyse des logiques sociales et professionnelles qui ont conduit à la fois à la constitution d’un professionnalisme de la communication, et aux conditions sociétales de son extension.

Ce chapitre aborde les travaux de CLM sur ces questions à partir de trois thématiques. Dans la première partie nous verrons comment il replace dans une perspective historique la constitution d’une sphère professionnelle où la communication a contribué au déplacement d’un professionnalisme à l’autre. Puis nous montrerons l’importance que CLM accorde à la communication managériale en tant qu’elle est indissociable dans ses finalités de la communication dite institutionnelle. Enfin, la troisième partie sera consacrée aux acteurs professionnels de la communication dont CLM aborde les pratiques dans une perspective plus politique que sociologique.

1. La sphère professionnelle : contribution de la communication au déplacement d’un professionnalisme à l’autre

Pour CLM la « sphère professionnelle » n’est pas à considérer comme un espace social et professionnel qui serait celui de l’entreprise moderne. Son émergence doit être étudiée très en amont comme la résultante d’un processus historique de différenciation sociale, et de longue durée, qui se développe dès le XVème siècle avec l’apparition d’une économie capitaliste précoce en Europe qui prendra toute son ampleur au cours du XIXème siècle. C’est avec F. Taylor que le mouvement de normalisation professionnelle et de consolidation d’une sphère professionnelle – désormais radicalement séparée des sphères privée et politique – ce serait imposée, autour d’un archétype du « professionnel » entièrement dédié à sa tâche de travailleur (Le Moënne, 1995, p.155).

Compte-tenu de l’importance prise par les entreprises ce mouvement aurait étendu la portée de la sphère professionnelle dans « le monde vécu social » et dans la société, bien au-delà de ses fondations et de son lieu d’émergence. Ses normes auraient colonisé et envahi la sphère publique. Mais contrairement à ce que certains discours pourraient laisser croire il n’y aurait pas eu de « démocratisation » de l’entreprise. CLM conteste l’idée que « les entreprises seraient devenues des ‘espaces publics partiels ‘, ce qui supposerait que les normes de la sphère publique démocratique se soient étendues à la sphère professionnelle » (Le Moënne, 1995, p.148). Il constate que les années 70-80 ont certes été marquées par l’expression de critiques sévères à l’égard du taylorisme et de la division instaurée entre travail intellectuel et travail manuel ; mais que les initiatives en faveur d’une réhabilitation de la participation des travailleurs manuels et d’une expression élargie au sein des entreprises n’ont pas abouti à ce qui a été présenté comme une démocratisation de l’entreprise. Les lois Auroux comme les démarches dites participatives (notamment les cercles de qualité) ont buté sur la persistance d’une vision largement demeurée « quantitative, mécaniste » où l’information-signal (déclenchant les commandes, organisations les flux de production, etc.) prime sur ce qui serait un espace communicationnel de partage du sens du travail et d’élaboration d’imaginaires communs.

Par un coup de force largement accompagné par les professionnels de la communication, sous des facettes multiples, « l’idéologie de l’entreprise ou idéologie professionnelle » (Le Moënne, 1995, p.149) se serait imposée : «(...) on peut constater que les directions d’entreprise ont pris conscience assez récemment de ce que les organisations pour exister et durer doivent non seulement expliciter et faire partager des normes, des procédures, des règles formelles, mais également de l’imaginaire et des représentations susceptibles d’être partagées au-delà de ce qui les constitue formellement. (…) Instituer un espace symbolique qui serait l’entreprise suppose en effet d’instituer symboliquement l’ensemble de ses espaces dans l’imaginaire social global » (Le Moënne, 1995, p.146-147).

La communication consisterait finalement en une « tentative d’articulation de pratiques, de discours et de modalités d’actions symboliques qui viserait à atteindre, à normaliser, à agir sur les trois espaces des entreprises » (Le Moënne, 1995, p.147) : l’espace de la mise au travail et de son organisation ; l’espace de l’administration, de l’organisation structurelle, bureaucratique ; l’espace global des relations entre les entreprises et leurs différents environnements.

Elle tendrait à orienter volontairement les imaginaires sociaux et l’opinion publique dans l’intérêt des entreprises : « la communication institutionnelle marque bien la volonté de soumettre la sphère publique aux normes entrepreneuriales » (Le Moënne, 1995, p.148). CLM établit aussi une relation avec la « professionnalisation managériale » des discours et des pratiques des hommes politiques qui auraient souscrit à une vision de la gestion de « l’entreprise France »[6]. Dès lors, la communication comme instrument du déploiement d’une idéologie entrepreneuriale capitaliste participerait à la « vassalisation » de l’espace public et à l’affaiblissement du politique.

L’analyse de la fonction communication en tant qu’opérateur de l’organisation ne peut se comprendre qu’à partir d’un double recadrage de la perspective. CLM opère un élargissement au niveau sociétal qui permet d’embrasser dans des dynamiques globales le niveau méso – où se situe la place de la communication parmi d’autres fonctions de l’entreprise. Il procède par ailleurs à un recadrage temporel et sociohistorique, réfutant l’idée d’une évidente évolution de la structure organisationnelle qui serait liée aux contingences des évolutions de leur environnement économique.

L’extension de la « sphère professionnelle capitaliste » impacte directement la définition et les normes de métiers dans tous les corps professionnels hérités des époques préindustrielle et industrielle. Les cercles sociaux – que le sociologue Georg Simmel (1908) définit comme des environnements sensés – et autrefois concentriques (la famille, le village, la corporation) connaissent à l’ère moderne une différenciation et une dissociation progressives consécutives à l’essor des mobilités géographiques, urbaines et professionnelles et en rapport avec la division industrielle du travail et le développement du salariat. La notion de sphère – multidimensionnelle – et singulièrement de sphère professionnelle permet à CLM de rendre compte du fait que l’espace social du travail ne peut se réduire à la dimension instrumentale à laquelle Habermas semble assigner la « sphère marchande » et qu’elle est « susceptible de posséder ses logiques et ses normes culturelles propres et revendiquant son appartenance au ‘monde social vécu’ » (Le Moënne, 1995, p.150). A partir de là, CLM cherche à montrer que la forme particulière du capitalisme qui se déploie au 19ème siècle est non seulement économique (puis financière) mais surtout « hautement symbolique » puisqu’elle doit, pour se déployer, déconstruire des normes culturelles et professionnelles et valeurs antérieures pour en imposer de nouvelles en agissant par exemple sur l’exactitude et la temporalité chronométrée de l’atelier, ou sur l’exclusion, au sein l’usine, du débat politique car le « vrai professionnel » doit être tout à sa tâche. CLM se démarque clairement de l’idée avancée par Bernard Miège (1995, 2010) dans l’analyse de la situation contemporaine, qui serait pour celui-ci caractérisée par un « espace public fragmenté » ou par l’existence d’« espaces publics partiels », favorisés par la segmentation des intérêts, les techniques participatives des relations publiques et le concours des TIC. Ces espaces publics partiels devant alors être étudiés en tenant compte des conditions contextuelles de leur développement. Pour CLM une telle thèse présentant l’entreprise comme l’un de ces espaces publics partiels supposerait que les principes du débat, de la délibération en rationalité, de l’espace public général y soient (au moins partiellement) transposés. Or il fait (dès 1995) l’hypothèse inverse : ce sont « les normes, procédures, valeurs issues de cette sphère [professionnelle] qui se sont étendues à l’ensemble de l’espace public » (Le Moënne, 1995, p.140). Ainsi pour CLM, la communication a joué un rôle majeur dans le processus d’évolution « d’un professionnalisme de métiers à un professionnalisme organisationnel de projet » (Le Moënne, 1998, p.161).

La professionnalisation de la communication n’est donc pas seulement, ni même principalement à analyser du point de vue de l’institutionnalisation d’une fonction ou d’une profession – au demeurant très hétéroclite et certainement très éloignée des professions établies au sens du fonctionnalisme anglo-saxon développé dans les années 50 par Robert K. Merton et Talcott Parsons – mais à l’aune de la puissance d’imposition des normes dont elle est porteuse. À condition de redéfinir la portée de la communication au-delà de sa face la plus visible associée à la production sémiotique de la communication institutionnelle et de ses déclinaisons, il est possible de mettre au jour une bascule plus souterraine mais d’une importance capitale pour comprendre les mutations de métiers, d’actions collectives, d’identités professionnelles. Cette bascule qui ébranle les métiers et les collectifs traditionnels pour imposer des normes d’efficacité organisationnelle désormais mondialisées est en particulier rendue possible par la « communication organisationnelle managériale ». Ici CLM rejoint l’analyse développée par Bernard Floris sur le « management symbolique » des organisations (1996) : « La communication réside fondamentalement dans ce processus d’élaboration et d’adaptation constante des ‘normes organisationnelles’ dont les référentiels sont le produits et le vecteur (…) référentiels d’action et d’évaluation qui visent en permanence à expliciter les buts collectifs de l’action organisée. (…). La communication managériale notamment les stratégies institutionnelles visent à instituer tout à la fois les organisations et des environnements sociétaux cohérents avec leurs buts, par un travail de symbolisation (...)» (Le Moënne, 1998, p.158-160).

La question des référentiels et plus largement des traces (écrites, techniques, matérielles) qui rendent compte de la cristallisation de normes d’action face à des situations professionnelles constitue un objet d’étude que CLM approfondit dans un texte de 2007 dont la visée est explicitement programmatique : « Recomposition des espaces et des formes organisationnelles : quelles questions pour quels programmes de recherche » (Le Moënne, 2007).

Sa démonstration reprend la production des référentiels – d’abord vus comme fixation de normes hétéronomes imposées – pour la compléter d’une dimension proprement référentielle indispensable aux collectifs de travail en tant que « dispositifs de coordination ». Leur élaboration suppose des efforts conjugués d’explicitation, de clarification et de confrontation qui permettent de désigner des méthodes collectives, professionnellement acceptables, « convenant » aux situations rencontrées. Cette orientation qui s’alimente de la sociologie des conventions indique dans les travaux de CLM un infléchissement vers une perspective socio-pragmatique et constructiviste plus sensible au monde vécu à un niveau microsocial même si elle demeure fortement arrimée à une pensée macrosociale politico-historique, voire anthropologique.

L’observation du travail d’accompagnement des mourants en établissement de santé, l’amène à souligner les ajustements collectivement et progressivement opérés par les équipes pour préserver « avec professionnalisme » l’intimité des familles dans un moment autrefois pris en charge par l’institution familiale et ses rituels hérités et désormais dévolu à l’institution hospitalière. Là où la confusion des sphères privées et professionnelles serait préjudiciable, CLM montre en quoi le professionnalisme se construit sur et à partir de la mémoire des expériences passées et par l’accumulation d’expériences collectivement discutées comme autant de situations singulières mais aussi cumulables ou comparables et qu’il convient donc de requalifier comme situations professionnelles.

Ce sont donc les communications de travail et au travail, et l’in-formation qui résulte de l’effort collectif pour opérer des « clarifications conceptuelles et sémantiques », élaborer des modèles ou modélisations non normatives d’aide à la pensée, à la décision et à l’action, qui fondent et refondent les professionnalismes dans les organisations. Ces dernières, parce qu’elles sont désinstitutionnalisées, non héritées, ont l’obligation pour persister de se concevoir comme « projets », « formes-voulues », « formes-inventées », « formes recomposées » (Le Moënne, 2007, p.217) au prix d’une intense activité info-communicationnelle.

Dès lors, on comprend que pour CLM tous les membres d’une organisation (ou, dit autrement et pour échapper à toute substantialisation de l’organisation-structure, tous les acteurs impliqués dans un projet qui fait organisation) sont aussi des acteurs et des sujets de la communication organisationnelle. Le phénomène de « mise en communication généralisée » mis au jour par CLM est loin de ne concerner que les professionnels de la communication, les « communicateurs officiels » :

« Il ne fait pas de doute pourtant que, par-delà l’inévitable flou qui entoure toujours les définitions du «professionnalisme », ce sont des groupes professionnels très étendus et autrement plus larges que ceux qui en portent l’intitulé qui se trouvent sommés de se transformer en communicateurs professionnels d’entreprises, depuis les maîtrises intermédiaires de l’industrie jusqu’aux responsables de la logistique et de la qualité totale...jusqu’aux journalistes et aux multiples consultants quand ce ne sont les responsables et acteurs de l’éducation nationale. Le champ professionnel de la communication d’entreprise, qui déborde très largement les entreprises, joue ainsi un rôle plus central que ne le disent – et peut-être ne le comprennent – les communicateurs officiels dans la recomposition du champ managérial et plus largement dans celle des entreprises et des diverses organisations sociales. » (Le Moënne, 1994, p.50).

On peut s’étonner que CLM n’inclut pas explicitement dans ce vaste ensemble d’autres catégories d’acteurs influents, défenseurs de la réputation des firmes et promoteurs d’environnements favorables à leur développement qu’il s’agisse des avocats, des lobbyistes ou représentants d’affaire, des « porte-paroles » sollicités pour orchestrer une communication pointue lorsqu’une crise bouleverse les positions établies.

De même CLM laisse dans l’ombre pendant une longue période le rôle croissant pris par les firmes multinationales des industries des télécommunications, de l’informatique et du logiciel, les grands acteurs des industries culturelles et créatives, véritables empires régnant sur la maitrise de l’information et de la communication, tant du point de vue des contenus que des interfaces et dispositifs de stockage et de diffusion, des infrastructures technologiques et devenus en quelques années les propriétaires quasi exclusifs des données et des traces laissées en masse par les consommations et navigations sur le web. Ces géants qui échappent au contrôle des États, capables d’imposer des normes techniques et parfois juridiques au monde entier, sont aussi par l’étendue de leur emprise sur la consommation des opérateurs puissants de la structuration des imaginaires et des représentations sociales mais aussi des pratiques info-communicationnelles et de consommation.

Considérant que, trop souvent, les études menées sur les dispositifs techniques, les TIC en entreprises, relèvent d’approches techno déterministes poussées par des financements privés et orientées par les intérêts des firmes, CLM se réfère peu aux travaux empiriques pourtant nombreux en SIC et en sociologie qui questionnent dans une perspective critique les effets de rationalisation et de normalisation liés aux logiques d’informatisation des organisations (signalons les travaux de Bouillon, Durampart, Mayère en SIC ou encore Segrestin, Vinck en sociologie, pour n’en citer que quelques-uns). Pourtant son approche des communications organisationnelles et managériales décentrée de la seule fonction communication le conduira à aborder les enjeux propres aux activités de gestion portées tant par le management que par les systèmes d’information.

2. La communication managériale et le « management »

2.1 Une étude des finalités plutôt que des modalités

Si le rôle de la communication dite institutionnelle est « d’instituer symboliquement les firmes » et d’en redessiner les contours précisément en raison des phénomènes de dislocation, de déterritorialisation, d’éclatement des frontières antérieures du dedans/dehors liées à l’externalisation des activités, aux fusions-acquisitions capitalistiques et à la mondialisation, il est aussi de « susciter un ‘sentiment d’appartenance’ chez des salariés qui participaient du projet d’entreprise mais ne croyaient pas une minute à la stabilité de leur emploi ou de leur fonction » (Le Moënne, 2008, p.147).

Historiquement, la mise au travail dans la période industrielle est avec Taylor celle de « la soumission à la machine » dont la cadence est orchestrée par des logiques d’opérations disjointes et rationnellement agencées. L’ordre communicationnel qui se déploie dans le modèle taylorien est celui du contrôle, de la surveillance, de la discipline et de la neutralisation de toutes perturbations (sociales ou techniques). Cependant, dévitalisant le travail de toutes ses significations et de ses socialisations antérieures, le modèle taylorien produit des effets délétères de « désenchantement du monde » et d’anomie qui menacent la prospérité et la stabilité des formes capitalistes. La « mise en consommation » généralisée, sera l’issue par laquelle se renouvellera l’imaginaire propice au développement du capitalisme mais aussi, selon CLM, participera à « redonner du sens au travail » (Le Moënne, 2006, p.106). Parce que le travail permet grâce au revenu qu’il procure d’accéder à la consommation, de satisfaire les besoins « primaires » et « secondaires » des individus, mais aussi de « se situer socialement et culturellement, exister donc » (Ibid. p.107), un nouveau consensus peut s’établir et effacer le risque de la lutte des classes.

En instillant au sein-même du procès productif la figure du client et l’acte d’achat comme signal déclencheur de la fabrication, la consommation devient la raison d’être du travail en même temps que son aboutissement. La communication managériale se déploie dans la sphère professionnelle et du travail, adossée sur les « démarches qualité » et la promesse de « qualité totale » qui encadrent et définissent la fois le résultat produit et le processus de production, outillée par des TIC qui normalisent et régulent les formes et les flux informationnels, légitimée par une idéologie instituant les entreprises « comme les instances fondatrices du sens global : l’économie de marché comme fondement du lien social » (Le Moënne, 2006, p.113).

CLM pressent précocement les conséquences du renouvellement des technologies de gestion, d’information, de communication dans l’apparition de nouveaux métiers : ceux qu’il nomme les « communicateurs techniques » spécifiquement dédiés à la recherche, au traitement et à la traduction des informations utiles à la réalisation de projets divers, préfigurent au milieu des années 1990 les data analystes aux compétences devenues très recherchées vingt ans plus tard.

Il n’a de cesse de rappeler au chercheur de ne pas se focaliser sur la montée en visibilité des communicateurs associés aux seules RP et à la communication institutionnelle pour prêter une attention aux phénomènes d’évolutions des communications organisationnelles. Ces phénomènes plus profonds mais plus déterminants sont d’ordre anthropologique car ils concernent « le surgissement de sens », la traduction des micro-innovations, les processus de « formation diffuse » par imitation, imprégnation, les « questions d’interfaces entre humains et non-humains ».

Si la prévision de voir apparaître des « nouveaux métiers de communicateurs directement intégrés dans les ateliers et les équipes de production ou de gestion de la logistique » (Le Moënne, 1995, p.51) ne s’est pas réalisée telle que, le constat de la montée en puissance du rôle des communications et du traitement informationnel au cœur de l’activité productive dans un environnement devenu structurellement incertain et instable, caractérisé par l’événement et non plus par le process, a été établi (Zarifian, 1992 ; Veltz et Zarifian, 1993).

Dans un texte consacré aux questions éthiques, CLM (Le Moënne, 2008) met lui aussi l’accent sur les dispositifs techniques et procéduraux qui, à partir d’un « pilotage par les instruments » entrainent un puissant mouvement de normalisation (qualité, bonnes pratiques, standards techniques, etc.) structuré et structurant des « flux continus de signaux » (Ibid., p. 44).

Pour Zarifian comme pour CLM, cette évolution implique des nouvelles compétences, des « capacités communicationnelles’ qui sont tout à la fois capacité à contrôler et gérer les signaux informationnels – techniques, informatiques, culturels – et capacité à gérer le sens, à débattre des interprétations possibles (…) (afin) d’obtenir l’adhésion des opérateurs à une logique d’auto-contrôle, ce qui suppose l’adhésion à un sens commun minimal (…) » (Le Moënne, 2008, p.46-47). Elle implique aussi une volonté d’agir sur autrui, d’imposer des règles et normes de travail, de modifier les comportements ; au sens fort il y a une « offensive symbolique » et un ensemble d’interventions qui sont des « stratégies d’influence » menées par les « milieux managériaux » (Ibid., p.47).

Les démarches qualité, le « service-client », les projets de responsabilité environnementale et sociétale, les références à l’éthique, le déploiement des TIC (intranets et autres réseaux sociaux d’entreprises) accompagné des métaphores du réseau et du virtuel sont autant d’interventions à analyser comme des leurres visant la recherche d’un consensus et d’imaginaires communs qui masquent la réalité de rapports de domination. Communication managériale et communication institutionnelle sont chez CLM indistinctement orientées vers une finalité commune de réduction de sens, d’auto-légitimation, au profit d’une performance sociétale conforme aux nécessités du capitalisme avancé.

2.2 Derrière l’étendard de l’éthique

Parmi les discours managériaux, au tournant des années 2000 se développent des communications autour des questions d’éthique – chartes d’éthique, codes de déontologie, etc. –  auxquelles Catherine Loneux a consacré sa thèse soutenue en 1997 sous la direction de CLM ; puis de nombreux travaux lorsque se multiplient les engagements à l’égard de la RSE (responsabilité sociétale des entreprises).

Critiquables et critiqués lorsqu’ils apparaissaient trop visiblement orientés vers des buts promotionnels et publicitaires, les discours entrepreneuriaux promoteurs de l’éthique et de la RSE avancent des arguments nettement plus acceptables aux yeux des opinions. Pour CLM, ces discours confortent sa thèse d’une communication d’entreprise opérant un incessant travail symbolique de mise en acceptation du capitalisme. L’éthique et la RSE sont brandies comme des étendards par les dirigeants d’entreprises au moment même où la financiarisation des affaires conduit à un enrichissement sans précédent des actionnaires et du grand patronat et à une déconnexion entre valeur financière, boursière et « économie réelle ». Ces communications « éthiques » visent ainsi à : « Instituer l’entreprise comme institution sociale centrale dans l’imaginaire collectif et à instituer symboliquement des environnements sociétaux tels qu’ils ne soient pas des obstacles aux stratégies managériales, à les ‘normaliser’, non pas par la force, mais littéralement ‘par les valeurs’ » (Le Moënne, 2008, p.45).

Dans ce mouvement, s’opère aussi une dangereuse assimilation sémantique entre « service public » et « service client », entre éthique et relation client-fournisseur, que CLM dénonce car il s’agit non d’éthique mais d’une mystification qui concourt à la construction sociale d’une « société de l’information » vidée de toute substance significative et profondément excluante pour « tous ce et tous ceux qui ne possèdent pas le code » (Ibid., p.51).

Cette perspective critique radicale d’une éthique falsifiée – nécessairement déformée par le projet capitaliste – écarte toute possibilité de considérer (avec Habermas) les conditions à partir desquelles la communication et ses acteurs (spécialisés ou non) pourraient être interpellés du point de vue de leur contribution à un choix de valeurs. A la lecture des différents textes de CLM, apparaît une oscillation – peut-être une tension qui reste à élucider – entre, d’une part, une vision qui dénote un certain pessimisme face à la puissance des « imaginaires hérités », des « magmas » chers à Castoriadis et, d’autre part, une optique Simondienne plus optimiste qui permet de penser les phénomènes d’invention, d’émergence, la capacité à « produire du commun », à « résister au chaos » (Le Moënne, 2007, p.220).

Reste que certains acteurs désignés comme « communicateurs » ont pour responsabilité d’assumer une activité spécifique de symbolisation et de sémiotisation, d’endosser une fonction dont l’apparition puis la systématisation dans les organigrammes indiquent un phénomène qui mérite une attention particulière. C’est l’un des paradoxes de la pensée englobante de CLM que de reconnaitre, pour les dénoncer, les effets dévastateurs et la portée immense de la communication mais de refuser d’examiner empiriquement les activités concrètes au plus près des pratiques professionnelles et de leurs acteurs.

3. Les acteurs professionnels de la communication

3.1 Une approche plus politique que sociologique des « communicateurs »

Dans la perspective d’une analyse sociétale de la « mise en communication généralisée » comme condition et prolongement de la mise au travail et de la mise en consommation (Le Moënne, 2006, p.110) aborder la question des acteurs individuels et collectifs, groupes professionnels, représentants corporatifs, est incontournable. CLM a consacré une partie de son mémoire d’HDR aux ‘dircoms’ et à la figure professionnelle qu’ils incarnent au moment où la communication se structure comme pratique professionnelle et s’impose parmi les grandes fonctions de support de l’organisation.

Dans ses textes ultérieurs, les références directes et précises aux professionnels de la communication sont finalement assez peu nombreuses. Les acteurs de la communication comme activité-métier, leurs caractéristiques socioprofessionnelles, leurs trajectoires, les dynamiques d’évolution de leur démographie ou de leur statut ne sont pas principalement l’objet de recherche de CLM. Le projet d’une sociologie des communicateurs – dans leur diversité sous différentes appellations – n’est pas le sien.

CLM conteste même l’idée d’une « explosion de la communication » à partir de la fin des années 1980 et indique dans son HDR des créations de postes autour de 300-350 par an. Il évalue (sur la base d’une enquête « Dir-Com radiographie d’une profession, Paris, 1989») à 250 à 300 le nombre de ceux qui seraient précisément « directeur de la communication » ; tandis que la plupart des autres « responsable de la communication », « chargé de communication », « en charge de la communication interne » occuperaient des postes plus techniques que stratégiques et généralement subordonnés à des directions concurrentes : marketing, RH, commerce ; ou auprès des politiques, élus etc.

Pour nos propres travaux menés sur la professionnalisation de cet ensemble d’activités (Lépine 2018) nous sommes revenus sur l’analyse des données officielles disponibles. Les statistiques de la Dares[7] corroborent une croissance très nette des effectifs (sous la réserve que ces statistiques regroupent les emplois occupés dans les métiers de la communication et les métiers de l’information, de l’édition et de la documentation). Dans la période 1982-84 à 2002-04 la croissance annuelle de l’emploi des professionnels de la communication et de l’information a progressé de 4,3 % en moyenne chaque année, contre 0,5 % tous métiers confondus – cet écart est très significatif. Dans la décennie suivante (2003-04 à 2012-14) cette forte croissance s’est significativement estompée pour revenir à un niveau moyen de +0,7/ an soit légèrement plus que la croissance globale des emplois (+0,6%) sur la dernière période.

Ces statistiques issues des relevés de l’INSEE concernent des emplois et des métiers qui vont bien au-delà du poste de dircom. On peut toutefois estimer que cette fonction de direction de la communication (sous des appellations variées) a participé à la très forte dynamique de croissance des emplois recensés sous le terme générique de la communication. En particulier si l’on prend en considération que l’effectif des cadres de la communication a atteint, en 2003-05, un niveau « record » de 50 000 personnes, suivi d’une forte érosion dans la décennie suivante. En 2012-14, les cadres de la communication recensés ne sont plus que 40 000, soit une baisse d’effectifs de 20% en dix ans – compensé par l’augmentation massive des emplois d’assistants de communication (passés de 26 000 dans la précédente période à 39 000 dans la période actuelle).

Cela tend à monter qu’il y aurait bien eu un important développement (sinon une explosion) des emplois de dircoms (et/ou des cadres de la communication sous des appellations variées) dans les deux dernières décennies du 20ème siècle, auquel a succédé à la fois une banalisation et une généralisation de la communication qui s’est traduite par le recrutement en nombre d’« assistants » plus ou moins spécialisés compte-tenu de la diversification des techniques et outils de communication. Ce mouvement de relative dépréciation des métiers de la communication sur le marché de l’emploi est corrélé à un taux de féminisation important : la part des femmes se stabilise (toujours selon la DARES) autour de 60% des effectifs avec des variations assez fortes selon les métiers exercés.

La crise de 2008 a sans doute aussi contribué à la contraction des emplois coûteux des cadres au moment où par ailleurs la maitrise des techniques de la communication numérique justifiait le recrutement de profils de spécialistes (Community manager, web designer, rédacteur de contenus numériques, conseiller en e-réputation et communication de crise, etc.).

3.2 L’agrégation d’une multitude (indifférenciée) d’acteurs derrière un intérêt commun

Il est assez frappant de constater le peu d’intérêt consacré à la spécificité des différents groupes d’acteurs impliqués dans la définition, la promotion et la diffusion des pratiques professionnelles de communication dans les travaux de CLM. Les professionnels de la communication d’entreprise semblent constituer une multitude représentant des métiers ou des activités dont les spécialités ou expertises sont des constructions dont la portée dans la sphère professionnelle n’a guère de vertu heuristique utile pour la recherche.

Ainsi, sont convoquées dans deux textes parus la même année (Le Moënne, 2008a et Le Moënne, 2008b) : « les milieux managériaux » incluant « MEDEF, directions de firmes, consultants privés ou universitaires, publicistes divers », les « publicitaires et les spécialistes du marketing et de la communication » aussi rassemblés comme « publicitaires et autres conseillers en marketing et communication », les « professionnels de la communication et des relations publiques », les instituts de sondage, d’opinion et, plus largement encore, « toutes les activités professionnelles qui se sont développées à mesure de l’industrialisation des médias de masse ».

Parmi ces différents acteurs beaucoup ont en commun de devoir partager et promouvoir une « convention professionnelle » (Le Moënne, 2008b, p.147) équipée d’une sémantique commune (nourrissant l’imaginaire du projet : « identité », « culture », « projet d’entreprise», « citoyenneté » ; ou plus tardivement les métaphores propres à l’imaginaire technologique du « réseau, du flux, du virtuel » (Le Moënne : 2008a, p.47-49) et documents qui en consacrent l’importance sous la forme de « chartes internes », de référentiels, etc.) pour justifier leur raison d’être et leurs prestations auprès des entreprises, des administrations, des syndicats, des institutions politiques, collectivités, etc. Cette convention professionnelle vise « la délimitation symbolique (et éventuellement matérielle) des frontières des entreprises et des grandes institutions sociales » et « n’existe que parce qu’il y a dislocation des représentations antérieures des entreprises, et nécessité de les faire exister cependant dans les imaginaires sociétaux, dont ceux des salariés » (Le Moënne, 2008b, p.148).

Les activités et pratiques professionnelles agrégées artificiellement dans la notion de « communication institutionnelle » autour d’une fiction commode mais inconsistante – celle de l’image (de la marque, de la firme, ou de la ville) ou encore autour des discours de la responsabilité sociétale et environnementale (RSE) ou d’éthique, procèderaient d’un même projet dont la portée est éminemment politique. « Les stratégies d’images sont d’abord des stratégies politiques » (Ibid., p.145) : il s’agit d’imposer à l’échelle de la société et des institutions sociales qui la fondent, d’une part, et à l’échelle individuelle du monde vécu d’autre part, les normes, les logiques d’action, d’évaluation, d’organisation, processuelle, spatiale et temporelle de la firme capitaliste. « Les stratégies de ‘communication institutionnelle’ visent ainsi, danle même mouvement, à instituer l’entreprise comme institution sociale centrale dans l’imaginaire collectif et à instituer symboliquement des environnements sociétaux tels qu’ils ne soient pas des obstacles aux stratégies managériales, à les ‘normaliser’, non plus par la force mais littéralement ‘par les valeurs’ ». (Le Moënne, 2008a, p.45).

Dans le cadre du RESIPROC, nous pensons qu’il y a une nécessité à étudier beaucoup plus finement les caractéristiques et les dynamiques d’évolution de cet univers composite et hétérogène. Les travaux menés par les chercheurs de ce réseau depuis une dizaine d’années et publiés dans la revue Communication & professionnalisation[8], regardent les ruptures et les continuités ainsi que les efforts des communicateurs pour faire valoir leur professionnalisme à partir de points de vue et métiers différenciés (Brulois, Carignan, David, Errecart, 2016) ; soulignent les atypies, les hybridités des trajectoires professionnelles en communication (Baillargeon, Coutant, 2018). Ils étudient la manière dont les questions d’éthique sont formulées et portées dans le débat public en montrant l’intérêt d’analyses situées, d’approches sectorielles (Catellani, Domenget, Maas, 2017).

Parmi tous les acteurs qui contribuent à divers titres à la consolidation de la communication comme fait central dans la société contemporaine, CLM s’est intéressé à une catégorie aux contours flous : celles de ceux qu’il nomme les ‘consultants’.

3.3 Les consultants : une catégorie à part ?

Dans les textes de CLM, la référence au rôle spécifique des consultants apparaît dès 1994. Plus que leurs activités concrètes, ce sont leurs discours qui, précisément parce qu’ils se présentent avec la force de l’évidence, doivent être déconstruits. Pour CLM, il est clair que les consultants mobilisent une rhétorique critique voire « catastrophiste » à l’égard du modèle de gestion taylorien qui vise essentiellement la « mise en acceptabilité » de leurs propres prestations.

Les consultants vivent de la conduite du changement et nourrissent leurs conseils à l’aune de la nécessité d’un dépassement du taylorisme-fordisme et des modèles organisationnels en vigueur. C’est pourquoi ils sont amenés à revendiquer une posture critique qui crée en quelque sorte une confusion, voire un écran à ce qui serait la critique véritable du chercheur. CLM interroge : « qu’est-ce en effet qu’un point de vue véritablement critique dans une situation où un consultant pour vendre ses produits d’études ou de conseil doit être « critique » ? » (Le Moënne, 1995, p.160).

En effet, « (…) leur intérêt majeur est certainement de mettre l’accent sur ce que les discours managériaux enchantés essaient de masquer : les crises d’identité et de légitimité auxquelles la mise en œuvre de communications managériales volontaristes vise à trouver solution. » (Le Moënne, 1994, p.43)

Sans dévoiler dans ses écrits sa propre implication dans des activités de conseil – activités qu’il a toutefois fréquemment assumées lors d’échanges informels – CLM souligne la dangerosité de la récupération de la critique par des consultants en mal de différenciation sur un marché hautement compétitif : « Quiconque a fréquenté tant soit peu les sociétés de conseil sait que les approches ‘critiques’ (…) sont attentivement étudiées et dans la mesure du possible utilisées pour se créer un avantage concurrentiel sur les autres cabinets » (Le Moënne, 1998, p.162).

Agitant d’abord le chiffon rouge des dangers encourus pour les entreprises qui ne sauraient s’engager sur le chemin de la modernisation, les donneurs de conseil (sont identifiés comme tels aussi bien les consultants et «autres publicitaires » et par extension, les « dircoms » qui conseillent les directions des firmes), pourraient ensuite déployer leurs « discours enchantés » via une « communication by smiling around » qui permettraient de rétablir la consistance symbolique et la légitimité de l’entreprise face à ses parties prenantes, grâce aux méthodes des relations publiques et de la communication institutionnelle (Le Moënne, 1994, p.50).

Cette analyse de la capacité des consultants à utiliser le contenu des discours critiques pour servir leurs propres intérêts n’est pas sans rappeler celle menée par Boltanski et Chiapello à une échelle beaucoup plus large à propos du management dans Le nouvel esprit du capitalisme (1999). Ce faisant, CLM interpelle aussi indirectement la communauté des chercheurs en SIC : est-elle capable de produire un travail de dévoilement des logiques profondes et des analyses critiques qui aient une portée différente de celles des acteurs du conseil ? Quelle peut être la place de la recherche-action ou de la recherche-intervention et le rôle des chercheurs qui interviendraient sur le terrain des communications organisationnelles ? Sur ces sujets et sur sa propre activité de conseil et d’intervention notamment au sein du secteur social, CLM est demeuré très discret dans ses publications. On peut le regretter car les liens entre praticiens et académiques sont complexes (Morillon, 2016) et cette expérience de longue durée aurait pu être mise à profit pour identifier certains écueils propres à la recherche-action, notamment celui de la confusion avec les pratiques de consultance.

Pour conclure ce chapitre consacré aux acteurs professionnels de la communication notons que le terme d’acteurs n’est pas tout à fait approprié et n’est pas dans le lexique de CLM, en tous cas pas au sens de l’acteur stratège doté d’une rationalité cognitive (même limitée) lui permettant de décider et d’agir selon des intérêts bien identifiés. Ceux que CLM nomme le plus souvent « les professionnels », lorsqu’ils ne sont pas désignés par leur occupation spécifique, sont d’abord des humains au travail dont la condition ne peut être saisie qu’en regard de caractéristiques anthropologiques. Il en va ainsi de leur capacité à produire du social et de l’organisation : « la capacité organisationnelle comme aptitude anthropologique à résister au chaos, à faire surgir perpétuellement des formes sociales nouvelles, de nouveaux rapports de production et de nouvelles relations sociales » (Le Moënne, 2007, p.220). Et si l’on suit le raisonnement de CLM inspiré par Simondon, l’information serait une « forme source » un « germe » susceptible de provoquer cette « émergence » de formes organisationnelles. Les managers, les cadres de direction, les communicateurs, les consultants (englobés dans l’ensemble générique du management ou de la sphère professionnelle managériale), en tant qu’ils conçoivent et promeuvent des modélisations, des normes et des procédures, forgent et imposent des dispositifs, des techniques qui cristallisent des mémoires et savoirs collectifs et dans lesquelles sont projetées des idéologies d’efficacité, contribuent à la propagation de formes-projets et d’un agir professionnel orienté vers des buts, in fine au service du capitalisme.

Conclusion

Au final les travaux de CLM sur la structuration de la communication se focalisent non pas tant sur la fonction occupée par les dircoms ou sur des activités qui se professionnalisent autour de métiers mais sur sa finalité ou sa mission – non nécessairement intentionnelle et accessible à la raison d’agir de celles et ceux qui la performent. Il réfléchit à partir d’une approche critique, anthropologique, sociétale qui revendique un détour historique dans la longue durée et une construction théorique forte des phénomènes info-communicationnels et organisationnels.

L’approche critique de CLM et son inscription dans le champ des communications organisationnelles le conduisent à diriger son regard vers les mutations des formes organisationnelles et des motifs qui les traversent. Son apport dans l’analyse du rôle de la communication dans les évolutions du travail, est tout à fait original lorsqu’il réfute l’adoption des catégorisations opérées par les professionnels eux-mêmes. Notamment lorsqu’il questionne la distinction entre communication dite « interne » et « externe » ; lorsqu’il critique l’utilisation « naturalisée » de notions jugées sans fondement telles « communication institutionnelle » ou « corporate » ou la « RSE – responsabilité sociale et environnementale » ; ou encore lorsqu’il propose de traiter ensemble les pratiques des professionnels de la communication et celles liées aux dispositifs de gestion, de production, de qualité, etc. À ce titre, la communication managériale a constitué une importante thématique dans la réflexion de CLM et une focale de discussion féconde avec des auteurs comme Bernard Floris notamment à la fin des années 1990.

Le Moënne estime en réalité la réflexivité des praticiens limitée – et celles des chercheurs aussi finalement – car cette réflexivité est prisonnière de cadres de pensée qui ne permettent pas d’accéder à la complexité des phénomènes émergents, des capacités d’auto-organisation, de propension de formes, des normes techniques, sociales, organisationnelles. Mais chacun bénéficie des techniques (pas seulement les TIC) et d’environnements (de vie et de travail) qui sont chargés d’une « cristallisation de mémoires » dans ce qu’il nomme les « formes objectales », qui ne sont nullement réductibles à l’ordre du symbolique, du sémiotique, du discursif. (Le Moënne, 2012).

Aussi il conçoit comme une limite, sinon une erreur, de se focaliser sur les activités langagières, discursives et sémiotiques des communications, sur telle ou telle technique/pratique ou sur tel ou tel type d’acteurs. C’est pourquoi ses textes donnent à penser que CLM a intérêt limité pour la praxis et la diversité des pratiques professionnelles.

Des recherches-interventions menées aux côtés de nombreuses associations du secteur social et médicosocial, ainsi que l’encadrement d’une vingtaine de thèses, lui ont offerts un substrat empirique considérable. Mais c’est la montée en généralité et la conceptualisation qu’il préfère nous livrer. Les recherches empiriques concrètes sont rarement détaillées du point de vue de la méthode ou des résultats. Cependant les aspects plus sociologiques, abandonnés après l’HDR, et les recherches sur les groupes et pratiques professionnels notamment recomposés par le déploiement du numérique sont encouragés dans ses derniers textes (Le Moënne, 2015 et 2016).

Principaux articles de Christian Le Moënne travaillés dans ce chapitre

Le Moënne, C. (2016). Quelques questions concernant les recherches sur les processus d’information-communication organisationnelle. Revue française des sciences de l’information et de la communication en ligne, 9, 2016, mis en ligne le 01 septembre 2016. URL : http://rfsic.revues.org/2464

Le Moënne, C. (2015). Pour une approche « propensionniste » des phénomènes d’information-communication organisationnelle. Emergence et différentiation des formes sociales. Communication&Organisation, 47, 141-157.

Le Moënne, C. (2012). Technologies de l’information et de la communication et dislocation des entreprises. Vers une socio-économie des normes et des formes. Dans N.Denoit, (dir.) L’imaginaire et la représentation des Nouvelles Technologies de Communication (p.101-133). Presses de l’Université François Rabelais, Tours.Le Moënne, Ch. (2008). L’organisation imaginaire ?. Communication et organisation, 34(2) 130-152.

Le Moënne, C. (2007). Recomposition des espaces et des formes organisationnelles. Dans Y. Chevallier et B. Juanals (dir.) Espaces physiques et mentaux : identités et échanges. (p.209-225). Edition du Conseil Scientifique de l’Université de Lille 3.

Le Moënne, C. (2006). Les communications d’entreprise entre médias, réseaux et recompositions organisationnelles. Dans A.Bouzon (dir.) La communication organisationnelle en débat. Champs, concepts, perspectives. (p.103-121). L’harmattan Le Moënne, C. (coord.) (1998), « Communications d’entreprises et d’organisations », Presses Universitaires de Rennes.

Le Moënne, C. (1998). Communications institutionnelles et recompositions organisationnelles dans le secteur social. Dans Ch. Le Moënne (dir) Communications d’entreprises et d’organisations, PUR, p.145-164.

Le Moënne, C. (1995). Espace public et entreprise : penser la sphère professionnelle. Dans Paillart, I. (dir.), L’espace public et l’emprise de la communication, PUG, p.139-162.

Le Moënne, C. (1994). Communication « By smiling around » et crise managériale. Réseaux, volume 12, n°64. Les métiers de la communication, 29-52.

Le Moënne, C. (1994), Communications organisationnelles : problèmes et problématiques, Mémoire d’HDR, Université Grenoble 3.

Le Moënne, C., et Gallot, S. (2015). Les recherches en communication organisationnelle en France : quelques éléments de bilans et de perspectives. Communiquer, 13, 123-143.

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[1]Voir Christian Le Moënne (1990), L’ère des « communicateurs » ? : enjeux sociaux et politiques du phénomène de « la communication d’entreprise » en France (1968-1988), thèse de doctorat en Science politique, soutenue en 1990 à Rennes 1 sous la direction d’Erik Neveu. Ainsi que Christian Le Moënne (1994). Étudier les communications d’entreprises : problèmes et problématiques, Mémoire d’Habilitation à Diriger des Recherches (HDR), Université Stendhal Grenoble 3.

[2]Le RESIPROC a été fondé à Montréal il y a près d’une décennie à la suite d’une première rencontre lors du Congrès de l’ACFAS 2010 par un collectif d’enseignants-chercheurs (belges, canadiens, français) et praticiens représentants d’associations professionnelles. Pour une présentation plus détaillée sur les membres et activités scientifiques et éditoriale (revue Professionnalisation et Communication) de ce réseau francophone, voir https://resiproc.org/ .

[3]Ne sont référencés ici dans un ordre chronologique que les chercheurs français qui ont consacré dans la dernière décennie leur mémoire d’HDR à ces enjeux de la professionnalisation des activités de communication et de leurs acteurs. De nombreux autres travaux en France et à l’international indiquent le dynamisme de ce champ d’étude.

[4]European Public Relations Education and Research Association (ex CERP Education & Research et renommée Euprera en 2000) se donne pour objectif de produire et disséminer savoirs et méthodologies dans le domaine de la communication stratégique et des relations publiques.

[5]La Conférence permanente des directeurs et directrices des unités de recherche en sciences de l’information et de la communication regroupe les directrices et directeurs de 38 unités de recherche en SIC et a dressé un panorama des dix grands domaines représentatifs de la recherche en SIC sur la période 2012-2018.

[6]Allusion ici au développement en France des principes du Nouveau Management Public.

[7]DARES Portraits statistiques des métiers 1982 - 2014 - fiche U0Z - Professionnels de la communication et de l’information http://dares.travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/u0z.pdf ; page consultée le 14/11/17.

[8]La revue Communication & professionnalisation est en open edition https://resiproc.org/publications-du-resiproc/cahiers-du-resiproc/ – les numéros mentionnés sont consultables librement.


Pour citer ce chapitre : 

Lépine V., 2021, « La communication et ses acteurs : les enjeux et finalités au-delà de la fonction et des métiers », in Delcambre, P., et Gallot, S., 2021, Communications organisationnelles : Comprendre et discuter les propositions théoriques de Christian Le Moënne, ISBN : 978-2-9575064-0-8, p. 145-170.

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Chapitre 5 - « Dislocation-recomposition » : dynamiques organisationnelles face aux mouvements sociotechniques

Michel Durampart

Michel Durampart (chapitre 5 : « Dislocation-recomposition » : dynamiques organisationnelles face aux mouvements sociotechniques) à son tour se focalise sur une thématique récurrente dans les textes de CLM : l’insistance sur les phénomènes de « dislocation des firmes » (à partir des années 1970) et dès lors aux « recompositions ». C’est l’occasion pour Michel Durampart de s’interroger sur la place que CLM donne aux objets techniques, notamment aux appareillages numériques actuels dans son analyse info-communicationnelle de l’évolution des formes organisationnelles ; il estime qu’il s’agit là de penser les formes actuelles...

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